Antoni m'a dit de réserver dans la chambre numéro 17, ils occupent une petite chambre de 4 où il reste un lit :-)
A la réception, nouvelle mauvaise nouvelle : ils ont attribué "mon" lit à quelqu'un d'autre mais je peux aller dans la chambre de 6 lits en face... 
Je suis contrariée, insiste un peu puis laisse tomber, j'ouvre la porte de la chambre 18 et là...

Une chambre spacieuse, calme, nickelle, deux grandes fenêtres sans vis-à-vis avec télé grand écran (même si on s'en fout, c'est pour vous dire le standing), un grand lit deux places au milieu et... Personne d'installé. Je suis toute seule dans la chambre. Et j'ai un lit de princesse. Jubilation. 

Je ne veux pas renouveler l'exploit de Hong-Kong où, m'étant bougé les fesses trop tard pour m'acheter à manger, j'avais dîné de chips, frites et barre chocolatée. Donc je me dépêche de sortir (il est déjà 21h30), sans aucune idée de ce qui sera encore ouvert et m'attendant au pire. Sauf que je tombe sur... Un Indien est encore ouvert, Alleluia ! Petit repas végan et dans la joie avec du wifi pour répondre à presque tous vos messages en attendant Antoni. 
Retrouvailles chaleureuses, il me partage son programme du lendemain (visite des Gorges vers Paeroa à 30min de Thames) avec David, un pote de son école. I'm in.   

Le lendemain, Antoni est acheminé à Paeroa par un allemand avec qui il avait fait la rando la veille, mais qui malheureusement n'a qu'une seule place de libre dans son Van aménagé. Pas grave, je rejoindrai Paeroa en stop, je leur laisse quand même mes bagages. 

Le temps est, comme craint, gris et pluvieux. Je quitte Thames sous la bruine et rejoins la sortie de ville pour faire du stop, devant une station service. 
Quelques minutes plus tard, je suis interpellée par un indien du personnel de la station service qui, avec un accent à couper au couteau, me demande où je vais. 
Sans certitude d'avoir tout compris, je monte dans la voiture d'un autre indien qui me déposera 30min plus tard à Paeroa. Il semble que mon chauffeur soit le boss du petit vendeur, et que ce dernier m'a gentiment "arrangé" le trajet en convainquant son patron de faire un petit détour par Paeroa dans son trajet pour Auckland pour m'y déposer. Adorable. 

Quand je retrouve Antoni, il m'annonce qu'il n'a finalement pas encore réussi à trouver de logement pour le soir-même, et qu'il y'a très peu d'options disponibles. 
Je jette un coup d'œil avec le wifi de Library : le peu d'options existantes sont accessibles pour 2 personnes, et sont hors de prix (équivalent d'une centaine d'euros par chambre). 

Je décide de prendre les choses en main et dois envoyer une trentaine de messages. Parmi les 2-3 réponses, une positive. Yeah !

Nous irons donc dans un Airbnb qui est à 2-3km à pied, la dame va installer un troisième couchage. Go. 
Bon. La chambre est dans le sous-sol. Les lits sont carrément pas à la hauteur de ceux de l'hôtel de Thames et le prix est plus du double (40$ par personne VS 28$ au Junction Hotel).  

Allez ! Direction les Gorges de Karangahake avec Antoni. Il faut re-traverser la ville dans l'autre sens (vous vous rappelez la leçon numéro 3 de l'auto-stoppeur ?), mais après, ce devrait être assez simple. 
Sans beaucoup de conviction, on pouce quand même dès qu'on est sur l'axe, même si on est en plein quartier résidentiel et qu'il n'y a pas grand monde. Une voiture s'arrête, une jeune maman avec son p'tit à l'arrière. Un peu déjantée, un sourire large comme le monde, une gentillesse débordante ; elle devait juste aller en ville, elle nous emmène jusqu'aux gorges qui sont 8km plus loin. Gratitude. 

Avant de décoller, on se fait un déj sur le pouce avec Antoni. Vegan of course. Ça donne : pois chiches bios en boîte, mélangés à de l'avocat et de la sauce soja et un peu de riz, puis tartiné sur du pain de mie complet. Et des bananes. Pas mal. 

On passe l'apm à se promener dans les Gorges. Le chemin est magnifique, le terme "luxuriant" prend tout son sens ici : la forêt "déborde" littéralement. Du vert partout de toutes les formes, qui s'entrelacent et s'entremêlent partout, des oiseaux au paradis, qui chantent des chants inconnus au bataillon. Il paraît qu'ici, la forêt a le même aspect qu'il y a des millénaires. 
Nous sommes situés sur un ancien site minier (de l'or se nichait dans le quartz), d'où les allées bien dessinées, les galeries, les tunnels, les rails, les tuyaux encore là... Et des panneaux d"explication, qui rappellent notamment les expropriations des Maoris et la déforestation, toutes deux féroces et sans ménagement. Décidément. Mais comment notre espèce et notre civilisation a-t-elle le culot de s'enorgueillir là où elle devrait faire pénitence et profil bas, enfin ? 

Je suis remplie d'une certaine confusion et d'une certaine tristesse, quand je repense à ces peuples qui ont si bien préservé notre planète à tous, qui ont accumulé une science du vivant enrichie par un respect de ce dernier... Et qui ont été envahis, abîmés, sous-considérés, méprisés, humiliés, écrasés, quasiment exterminés. En Nouvelle-Zélande comme ailleurs, le bush à presque disparu. La forêt a perdu 70% de son territoire, principalement pour cause d'exploitations industrielles nécessitant des moyens de combustion peu coûteux comme le bois (cf les mines), et pour cause d'exploitations agricoles, en particulier pour les pâturages... Ah, l'élevage ! Que du bon, que du bien, que du bonheur !

Retour dans nos gorges. Il pleuviote, parfois plus. Heureusement, comme dirait l'autre "il n'y a pas de mauvais temps, il n'y a que de mauvais vêtements" ; or, Antoni et moi sommes équipés. Et marchons tranquillement, sous nos manteaux étanches et sous les averses généreuses néo-zélandaises. 

L'absence de lumière me manque, bien sûr, mais n'empêche pas de profiter du spectacle somptueux qu'offrent ces gorges. Le sol y est extrêmement ferrugineux, et à ce titre, les roches sont rouges orangées. La berge est recouverte par d'adorables galets, l'eau est transparente sur les bords et, obscurité oblige, noire au cœur du courant. Nous longeons d'en haut ou d'en bas le cours d'eau, qui est profond d'une cinquantaine de mètres, je dirais ?? (Antoni, je te laisse corriger en commentaire si je dis n'importe quoi).

Je sais combien la nature peut être régénérante en termes d'énergie(s), en particulier via l'eau vive. Cool ! Antoni est ok pour baigner, il est même le premier à plonger ! Antoni étant inhabitué au naturisme, je renonce à me baigner sans maillot. Et je me dis qu'il y aura d'autres opportunités, avec une petite pensée pour notre bain en mode "rainbow" totalement inattendu avec Julia et notre chauffeur lors de notre descente en stop pour le Mantra Fest l'été dernier :-)
Après quelques heures de balade et quelques minutes de stop, nous voilà déposés par un autre chauffeur adorable directement devant notre Airbnb. 

Rencontre de David, dîner préparé par Bibi avec les restes de tout le monde, et soirée passée à écouter David raconter son voyage et ses wwoofings improbables, à lire le Lonely Planet de Antoni, et à chercher des couchsurfers tout autour de Coromandel Park. Je prends plein de notes, j'envoie plein de messages, mais j'ai comme l'intuition que tout cela sert principalement à me rassurer. 

Je ne croyais pas si bien penser. 

Le lendemain, la journée du dimanche 11 décembre allait être la plus formidable, à date, de ce voyage. Et surtout, cette journée consacre un véritable tournant, depuis la galère du début, jusqu'à la plénitude en mode SURF IT EASY BABY !!!

NOTA BENE - Fin de l'arrivée  

Il y a un temps pour lâcher prise et se laisser guider. Et il y a un temps pour s'accrocher et ne surtout pas se laisser emporter par la torpeur, l'inertie, le découragement, le renoncement ! Je constate, pour filer à l'infini la métaphore de mon premier article, que ce n'est pas le tout de trouver la bonne plage et le bon spot. Il faut aussi mériter d'arriver avant de monter enfin sur sa planche et kiffer.